Voici un petit apercu, après cet article sur la langue japonaise du vocabulaire utilisé dans nos clubs.
Avant de commencer, une petite note sur l’écriture et la prononciation.
Au Japon, certaines expressions utilisées dans les clubs d’aïkido ne sont compréhensibles que par les pratiquants (car trop spécifiques).
Par exemple « sossenkyuukou » (un de nos principes) dont le nom vient d’un poème classique sino-japonais (reprise de la première syllabe des 4 premières lignes du poème), et que nous traduisons en français par « agissez avec confiance« , ou en anglais « perform with confidence ».
Un japonais qui ne fait pas d’aïkido ne saura pas de quoi il s’agit.
Certains noms de technique sont très explicites en japonais (« poignet renversé », « exercice du rameur » ), d’autres seront obscures pour un japonais (« premier principe », « projection dans les 4 directions », etc. ).
En pratiquant l’aïkido, vous pouvez donc découvrir un vocabulaire un peu spécifique.
Il y a plusieurs façons de retranscrire le japonais dans notre alphabet et parfois un mot japonais pourra avoir plusieurs transcriptions (aïkido, aikidō, aikido, aikidou…), qui parfois deviennent aussi utilisés au Japon!
Exemple la ville de Tokyo, qui doit être retranscrite « Toukyou » ou « Tōkyō » dans notre alphabet, ou le judo qui devrait s’écrire « juudou » ou « jūdō« .
- Le o long japonais se retranscrit « o » + « u » en japonais. Le u (ou un trait sur le o pour le représenter), est souvent oublié dans la retranscription.
- Le e long japonaise se retranscrit « e » + « i » en japonais. Sensei se prononcera donc senséé (é long) (et dans certains dialectes locaux, sensé-i).
Notre vocabulaire, nos noms de techniques peuvent donc avoir certaines variations dans leur écriture (mettre ou omettre le u, écrire aikido ou aïkido, aïkidou, …).
Se rajoute la question du pluriel également: mettre un s ou non. En japonais, un mot peut être singulier ou pluriel. Par exemple, aikidoka désigne le pratiquant ou les pratiquants en aïkido.
En français depuis la réforme de 1990, on peut ou non ajouter un s pour former le pluriel des mots étrangers. Aïkidoka ou aïkidokas.
A cela s’ajoute d’autres modifications, dûes au succès de l’aïkido: l’arbre a donné beaucoup de branches, certaines expressions ont été préférées ci et là selon les professeurs, qui a créé le club, etc.
Les techniques et postures peuvent avoir plusieurs noms, dans différents styles – je m’attache ici à notre pratique.
Cela signifie…
-pas de « osu » ou « heuss » cher aux marins, karateka et Ragnar le breton,
-pas de comptage en japonais (« itch », ni, san, …),
-pas de distinction ura/omotte, ai/gyaku hanmi (mais on parlera de « irimi » et « tenkan »)
-pas de « hajime » pour débuter une attaque
Maintenant un peu de vocabulaire
J’ai parlé de club, mais on parlera plus souvent de dojo (道場), c’est à dire le lieu ou on pratique.
De do (道, dō)場, la Voie, et jo (場, jō) le lieu.
En arrivant au dojo, le sensei (先生) accueille les élèves près des tatamis.
Traduit par professeur, maître, docteur, ce terme vient d’un caractère 先 pour avant, précédemment, et un autre pour la vie 生.
Le sensei est celui qui a vécu avant : il a une expérience donc, qu’il va pouvoir transmettre à autrui (professeur), ou utiliser (docteur, expert).
En Occident on dit « sensei » ou « sensei + le nom ou prénom du professeur. »
Le fondateur de notre art en Occident est par exemple sensei Williams.
Le sensei japonais qui l’introduit à l’aïkido dans les années 50 se faisait appeler par contre « Abbe sensei« : au Japon, on place « sensei » après le nom de famille.
Au Japon on fait de même avec « san », équivalent à monsieur/madame, ou kun pour les petits garçons, chan pour les petites filles, qu’on place après le nom pour appeler quelqu’un (jamais soi-même, par modestie) poliment.
Le fondateur de l’aïkido, Morihei Ueshiba, a créé un art martial et une philosophie de vie, cela lui a valu le titre de grand maitre ou « O Sensei » par ses disciples.
Le O est honorifique, il peut signifier « grand » ou indiquer du formalisme, de la politesse.
La politesse, le respect d’autrui, nous le retrouvons sur les tatamis – Par exemple en tout début de cours et à sa fin, nous nous saluons, genoux à terre, en « seiza« , 正座.
Ce mot vient de 2 caractères pour « correct » 正 et « assis » 座.
C’est la façon traditionnelle de s’asseoir au Japon, reprise dans bien des arts martiaux, particulièrement après l’ère Meiji (1868-1912).
En cas de soucis pour s’asseoir les genoux au sol ou maintenir cette position sans en souffrir, on peut s’assoir en tailleur (jambes croisées ou « agura » en japonais), ou rester debout.
Plus de détails ici: https://fr.quora.com/Pourquoi-les-Japonais-sassoient-ils-dans-cette-position-inconfortable-appel%C3%A9e-seiza-et-agura
Bien faite, la position permet de travailler les déplacements au sol, développer les muscles des hanches, assouplir les pieds.
Certains arts martiaux partent de cette position pour dégainer un sabre.
Lorsqu’un samurai s’essayait au zen, à la méditation, en seiza, la position ne devait pas lui abimer les genoux et sa capacité à se mouvoir lors des batailles.
Parfois des petits coussins sont ajoutés (si vous assistez à un tournoi de sumo par exemple, ou un concert de musique traditionnelle).
Bien des questions ont été posées sur comment maintenir la position.
Les aikidoka sont en tenue, avec un kidogi (ou dogi 道着, nos « pyjamas » blancs) et hakama (袴) noir. Et des sandales, ou zori japonaises.
Nos tenues sont plus épaisses que celles de karaté (pour éviter les déchirures lors des saisies) et moins épaisses que celles de judo (comme les prises sont plus légères).
Lors de la pratique, une personne (le « nage« ) va être attaquée par le « uke« .
Le uke va « recevoir » la technique du nage et se retrouvera projeté par exemple.
Les deux sont des « partenaires », pas des opposants.
Nous nous attaquons, défendons, pour nous faire progresser, pratiquer. Partenaires, pas ennemis.
Uke se retrouve dans le verbe japonais ukeru (受ける), recevoir.
« Faire ukemi » (受身), en judo et aikido, c’est ainsi recevoir 受 une technique avec son corps 身… souvent il s’agira de chuter.
Etant souvent au sol, on comprendra que nous voulions garder les tatamis propres – Entre les vestiaires et le tatamis, ne jamais marcher pieds nus!
Nage se retrouve dans le verbe japonaise nageru (投げる), projeter.
Ce terme va aussi se retrouver dans de nombreux noms de techniques résultant dans des projections (voir ci-dessous).
On utilisait aussi autrefois le terme de tori 取り, du verbe saisir en japonais.
Une technique peut être faite en allant vers la personne qui attaque, dans son espace, on parlera de « irimi »
ou, quand la personne vient nous attaquer, en se tournant pour aller dans la même direction, on parlera de « tenkan ».
Irimi, 入り身, se compose d’un caractère 入 pour entrer, adhérer, joindre, et un autre pour le corps 身.
Tenkan, 転換, se compose d’un caractère 転 pour tourner et un autre pour changer 換.
Lors de la pratique, uke va attaque le nage, qui va se défendre avec une technique d’aikido.
16 formes d’attaque ont été codifiées et sont progressivement apprises par les élèves pour leurs passages de ceinture,
de la première forme (uke saisit le poignet du nage, sur le côté opposé – sa main droite saisit le poignet droit du nage par exemple) à la 16ième forme (uke vient saisir le col du nage par derrière).
Pour chaque attaque, plusieurs défenses sont possibles
- ikkyo 一教, de ichi (un) + kyo (principe, degré), première technique d’immobilisation
- nikkyo 二教, de nichi (deux) + kyo (principe, degré), deuxième technique d’immobilisation
- sankyo 三教 , de san (trois) + kyo (principe, degré), troisième technique d’immobilisation
- yonkyo 四教, de yon (quatre) + kyo (principe, degré), quatrième technique d’immobilisation
- gokyo 五教, de go (cinq) + kyo (principe, degré), cinquième technique d’immobilisation
- shihonage 四方投げ, de shi (quatre) ho (hou, direction) + nage (projection), projection dans toute direction (eg possible dans n’importe quel sens)
- tenchinage 天地投げ, de ten (ciel, paradis) chi (terre) + nage (projection), projection jouant sur des mouvements vers le haut et le bas (ciel et terre)
- kokyunage 呼吸投げ, de kokyuu (respiration, équilibre, pause courte, astuce, secret) + nage (projection), projection jouant sur la coordination des mouvements et de la respiration, grande variété
- kaitennage 回転上げ, de kaiten (rotation) + nage (projection), projection par rotation du bras
- kotegaeshi 小手返し, de kote ( « petite main » ou poignet) + gaeshi (torsion), projection ou immobilisation en jouant sur le poignet
Il existait aussi des techniques avec les bras en croix (qui ressemble au signe 10 en japonais), qu’on appelait « projection en croix » (juujinage) et d’autres qui projetaient uke en le renversant sur nos hanches (koshi), qu’on appelait koshinage (abandonné car trop souvent le nage pouvait se casser les hanches).
Nous avons aussi des techniques avec armes.
Nous utilisons
- le tanto, un couteau long en bois, ou en japonais « courte (tan) épée (tou) »
- le bokken, une épée (ken) en bois (boku)
- le jo (long bâton, jou)
- et parfois le shinai (arme utilisée en kendo, 4 lanières de bambou assemblées).
Prononciation
aikido:a-ikido
sensei:senhsé
dogi:doggi
hakama:hakama (bien prononcé le H )
seiza:sééza
nage: nagué
uke: ouké
tanto:tanh-to
bokken: bokkène
shinai:chinaille
ikkyo:ikkyo
nikyo:nikyo
sankyo:sankyo (san se prononce SAN ou SA-N )
yonkyo:yonkyo
gokyo:gokyo
shihonage:chi-ho-nagué
kokyunage:kokyou-nagué
tenchinage:ten-tchi-nagué
kaitennage:ka-i-tenne-nagué
kotegaeshi: kotégaéchi